NOVILLADA du 22 Août 2010 à MAUBOURGUET :
extrait paru dans la Nouvelle République du 26 Août 2010
Le grand gâchis avec de si beaux taureaux
L’aficion bigourdane attendait énormément de la présentation des novillos de Paul et Jérôme Bonnet dans les arènes de Maubourguet. Dimanche soir, les novillos gersois étaient là et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il n’ont nullement déçu. Magnifiques de présentation avec leurs robes variées, leurs armures respectables, bien que relativement confortables, et leur très grande prestance, ils ont fait l’objet de l’admiration des spectateurs. Côté mental, il n’y eut pas non plus grand chose à leur reprocher. Trois d’entre eux furent très braves et très nobles et les trois autres un peu plus compliqués, bien que parfaitement toréables. Ce bétail permettait une novillada triomphale, ce qui ne fut hélas pas le cas à cause de l’inexcusable carence des novilleros et de leurs cuadrillas
Le troisième Bonnet était physiquement à la limite supérieure de la non piquée, mais il était toréable bien qu’exigeant une bonne brega et une lidia adéquate.
(Photos d’Antoine TORRES)
Angel Jimenez fit une petite faena honnête avec le très bon novillo d’ouverture, mais échoua lamentablement avec l’épée (9 essais infructueux et une demi-lame suivie de deux descabellos). Avec le quatrième qui n’avait pas de forces à revendre, il dessina quelques passes de bonne facture, mais ne se croisa jamais et se montra souvent brouillon. Après un essai infructueux, il enfonça une lame quelque peu latérale et obtint tout de même une oreille de réconfort.
Une des passes qui permirent à Angel Jimenez de couper la seule oreille d’une novillada qui en permettait bien d’autres.
Juan Ortega dessina les seules véroniques de la novillada, mais ne donna pas une passe de muleta digne de ce nom. Avec son costume aux broderies noires,
Alejandro Rubio a une certaine ressemblance de visage avec Rafael de Paula et la taille de Domingo Valderrama. Hélas, il n’a ni le génie du premier, ni le courage et la technique du second. A la moindre menace du toro, il jette aux orties muleta et épée et, visiblement saisi de panique, il prend ses jambes à son coup pour rejoindre le refuge le plus proche. Certes, le troisième novillo avait une présentation proche de la limite supérieure acceptable en matière de novillada non piquée, mais était parfaitement toréable à condition de lui imposer une « brega » et une « lidia » correctes. Le sixième novillo était bien présenté mais de taille très inférieure à celle de ses frères. Cela sembla mettre en confiance Rubio qui donna quelques passes prometteuses avant de reculer à nouveau et de s’échapper. Les divers prix prévus furent déclarés déserts pour être remis en jeu en 2011.
Face à pareil gâchis, nous étions en proie à une profonde colère en quittant les arènes. Force est de constater tout au long de la saison que si les novillos viennent à dépasser les 250 kg et les cornes la longueur des oreilles, il n’y a plus de novilleros. Cela est peut-être dû à un problème de société. Anachronique, la tauromachie fait appel à des conditions qui heureusement n’ont plus cours (la misère, l’envie de s’en sortir), mais aussi à des valeurs comme l’honneur et la responsabilité, devenues, hélas, surannées dans un monde où tout n’est plus que marchandise. Nous pouvons légitimement nous poser la question de savoir si la tauromachie authentique peut encore avoir le moindre avenir dans pareil bazar.